Très peu concerné par la révolte de nos agriculteurs, le nématode provoque de vastes dégâts dans les exploitations du monde entier. Ce ver parasite, amoureux des végétaux, est un réel problème. Il entraine de fortes pertes de rendement pouvant conduire dans certains cas à la ruine totale des récoltes. D’après l’INRAE, plus de 40% des exploitations maraîchères du sud de la France sont ainsi touchées avec une perte de rendement variant de 20 à 100%. Ce problème concerne toute la France. Face à ces redoutables ennemis, les victimes de notre décennie sont cependant bien démunies : interdiction de certains pesticides, difficulté à développer des solutions efficaces et donc, absence d’alternative.
Pour rééquilibrer l’équation, Evolutive Agronomy est entrée en jeu courant 2021. Cette start-up créée par Lucie Monticelli et Antoine Pasquier vise à lutter contre les nématodes grâce à des acariens. Suite à des essais en laboratoire, les deux jeunes chercheurs en ont identifié un type particulier raffolant de ces vers nuisibles. La start-up propose donc d’utiliser l’appétit des acariens pour réguler le développement des nématodes et réduire leurs impacts sur les cultures. Une solution de biocontrôle efficace pour répondre à des bioagressions.
COMPRENDRE POUR NE LAISSER AUCUNE CHANCE AU HASARD
Afin de confirmer les résultats obtenus en laboratoire, l’équipe d’Evolutive Agronomy réalise des essais dans plusieurs régions de France (Région Sud, Pays de la Loire, Nouvelle- Aquitaine). « Les conditions des exploitations agricoles peuvent varier en termes de température et d’humidité selon les régions. Il est donc important de tester l’efficacité de la solution proposée dans les différentes zones maraichères pour démontrer aux agriculteurs que le biocontrôle fonctionne proche de chez eux ! »
En effet, à basse température par exemple, l’acarien risque de mourir de froid. Il ne mangera pas les nématodes et l’agriculteur se dira que le biocontrôle ne fonctionne pas, alors qu’il n’était simplement pas adapté. Les membres de l’équipe réalisent donc des prélèvements tous les mois pour suivre et comprendre l’impact de la solution sur la parcelle traitée.
« LE PLUS DIFFICILE A ÉTÉ DE PRENDRE LA DÉCISION DE ME LANCER »
Lucie Monticelli n’était pas destinée à devenir entrepreneure. En post-doctorat après avoir soutenu une thèse en biologie, elle était vouée à un avenir dans la recherche académique. Un beau jour, Antoine Pasquier propose simplement : « Je voudrais créer une entreprise. J’ai besoin que tu me dises ce que tu en penses et j’aimerais que tu sois mon associée ». L’idée n’emballe pas tout de suite Lucie Monticelli qui ne se projetait pas dans un tel avenir professionnel. « Pour moi, le plus difficile a été de prendre la décision de me lancer. Je suis quelqu’un de très prudent, je ne joue jamais dans les casinos à cause du risque de perdre ! »
Six mois après pourtant, elle se surprend à revenir sur sa décision et se lance dans l’aventure. « Je suis passionnée par mon travail et je voulais venir directement en aide aux agriculteurs. » Ils effectuent alors une formation dans le centre entrepreneurial d’Université Côte d’Azur pour apprendre les fondamentaux de l’entreprenariat : création d’un business model, organisation d’une entreprise, comptabilité, etc. Leur projet se structure et ils développent la solution de biocontrôle composée d’acariens petit à petit. En parallèle, ils remplissent des dossiers de de demandes de financements et à force de travail, leur start-up se dessine. Ils accueillent trois nouveaux membres : une chercheuse, un ingénieur et une technicienne. Grâce aux premiers résultats concluants d’Evolutive Agronomy, la confiance des agriculteurs s’accroit.
Article réalisé dans le cadre du premier numéro d'INTERVALLE, le magazine du service Science et Société, grâce à la participation de :
- Lucie Monticelli et Antoine Pasquier, Co-fondateurs de l'entreprise Evolutive Agronomy, chercheuse et chercheur en biologie des interactions et écologie, spécialisée dans le domaine du biocontrôle.