Transporter l'information de demain

Projet SPHIFA : Transporter l'information de demain

La physique quantique a permis la conception et la mise en œuvre de nombreux dispositifs qui irriguent profondément la société, tels que le laser, le transistor, ou encore les systèmes de positionnement par satellite (GPS). Ces inventions trouvent leur origine dans des notions qui peuvent paraitre très abstraites à de non spécialistes, et pourtant elles sont au cœur de notre quotidien. Au cours des trente dernières années, les progrès scientifiques et technologiques ont poussé la compréhension et la maîtrise des systèmes quantiques au point de rendre possible la manipulation et la détection d'objets quantiques « individuels », tels qu’un atome, un photon ou un électron. Ce niveau de contrôle permet aujourd’hui la conception et à la mise en œuvre de nouvelles technologies quantiques, dont les applications dans les domaines des capteurs, du calcul, des communications, de la simulation ont été identifiées comme potentiellement disruptives. 

Le projet SPHIFA s'inscrit dans le contexte des recherches sur la photonique quantique. Cette voie de recherche explore les propriétés quantiques de la lumière, communément associées aux photons, pour coder de l’information quantique (on parle de « qubits », équivalent quantique d’un bit, mais avec plus de deux états possibles), et vise à d’accomplir des tâches de communication ou de calcul impossibles à réaliser avec les technologies basées sur l’électronique classique. Comme cela a été le cas pour l’électronique, la pleine valorisation de systèmes quantiques repose aujourd’hui sur la capacité à miniaturiser les expériences de laboratoire. La photonique quantique intégrée répond à ce besoin et permet de réaliser des puces photoniques capables de mettre en œuvre, sur un seul composant, plusieurs fonctions optiques (sources de lumière quantique, circuits, détecteurs). Cela permet de créer des dispositifs compacts, flexibles, fiables et peu couteux, adaptés à un déploiement à grande échelle. Aussi, afin d’améliorer les performances de tout dispositif quantique, il est primordial d’augmenter le nombre de porteurs de l’information, aussi bien que de maitriser leurs interactions. Pour faire simple, l’idée est soit de multiplier le nombre de possibilités de codage pour un même photon, soit de multiplier le nombre de photons impliqués, soit les deux ! Pour répondre à ce besoin, les chercheurs se tournent ainsi vers les états intriqués à haute dimension, impliquant donc plusieurs photons, et plusieurs possibilités de codage. L’intrication quantique est un phénomène dans lequel deux ou plusieurs objets quantiques (par exemple des photons) partagent un état commun : la mesure de l’un détermine instantanément l’état quantique des autres, même à distance. Dans le cas d’états intriqués à haute dimension, les informations sont portées par plusieurs (>2) faisceaux lumineux intriqués, ce qui augmente la capacité de codage et de transmission de l’information quantique. 

C’est dans ce contexte que s’inscrit le projet SPHIFA (Systèmes PHotoniques Intégrés pour la Fréquence et l’Architecture quantique), dont l’objectif est de concevoir des systèmes quantiques photoniques de nouvelle génération. Ces systèmes permettront de générer, manipuler et détecter des états quantiques à haute dimension, notamment des qudits et des états cluster (configurations d’états intriqués utiles pour le calcul et la communication quantiques). En ce qui concerne le projet SPHIFA, les faisceaux intriqués ont chacun une couleur différente et sont générés par des micro-anneaux du diamètre d’à peine quelques micromètres, intégrés sur Silicium : il s’agit d’une plateforme de choix pour la photonique classique et quantique, qui permet entre autres un interfaçage naturel avec la micro-électronique.

SPHIFA ambitionne de développer des démonstrateurs concrets : il vise notamment des systèmes pour la communication quantique multimode (utilisant plusieurs canaux de communications simultanément grâce à la couleur des faisceaux intriqués), et flexibles (adaptables à divers usages et environnements). L’objectif est de dépasser le stade expérimental pour proposer des solutions opérationnelles, intégrables dans les réseaux de communication existants. Plus en général, le projet a pour objectif de développer des ressources originelles qui peuvent être utilisées pour les technologies quantiques à base de lumière.

À plus long terme, ce projet s’inscrit dans la construction des futurs réseaux quantiques, qui permettront des échanges de données ultra-sécurisés à l’échelle nationale et internationale. SPHIFA entend ainsi renforcer les technologies et protocoles de communication quantique, avec des retombées majeures sur le plan scientifique (recherche fondamentale et appliquée), mais aussi sociétal, en améliorant la cybersécurité.

Enfin, le projet mise sur une dynamique de collaboration entre partenaires français, pour garantir une complémentarité des compétences. SPHIFA ambitionne de placer la France en position de leader européen dans le domaine des communications quantiques, à la fois en termes de technologies développées et d'applications concrètes.

Découvrez le portrait de Sébastien Tanzilli à l'origine du projet SPHIFA !

Fast and curious : Virginia D'Auria et Sébastien Tanzilli

Bientôt, retrouvez le projet SPHIFA dans une video au format Fast and Curious